Des nouvelles depuis de longs (entendez courts) mois
- Josué Maechling
- 18 juin 2022
- 5 min de lecture

Le 4 Juin 2022
Bonjour Fabien,
Cela fait de longs mois que je ne suis pas revenu vers toi. La vie en bateau passe à un autre rythme mais beaucoup de bonnes choses se sont déroulées depuis mon dernier email. Voilà un petit résumé de ce que j'ai pu faire. C'est peut-être trop long pour un seul article (si tu souhaites toujours continuer), libre à toi de condenser ce condensé. Des photos sont disponibles sur le compte instagram lié au site web (towellesstraveler.wixsite.com/tour) et sur ce lien **************** (j'en rajouterai des plus récentes).
Une fois arrivé aux Canaries mi-janvier j'ai décidé de débarquer du trimaran sur lequel j'étais et de continuer la route avec un autre équipage. J'ai donc passé 3 semaines à chercher une embarcation pour la suite, en "démarchant" directement les plaisanciers, en placardant des affiches et en fouillant sur internet. Après de nombreux faux-espoirs j'ai finalement été contacté par un couple de trentenaires ayant vu mon affiche et qui s'apprêtaient à partir pour le Cap Vert. Il y a aussi une autre cabine de libre sur leur catamaran et je suggère d'embarquer une amie bateau-stoppeuse rencontrée à Las Palmas de Gran Canaria.
Nous voilà donc en train d'explorer Tenerife et La Gomera avant de s'en aller pour 5 jours de navigation vers le Cap Vert. Là-bas, je découvre un morceau d'Afrique très diversifié selon les îles et un peuple qui met un pouce en l'air et sourit quand on dit bonjour dans la rue. Dans la foulée, je trouve un bateau sur internet qui a besoin d'un équipier supplémentaire pour traverser. La transition est rapide mais me laisse le temps de me faire un ami Capverdien futur professeur d'anglais, rencontré dans un taxi collectif sur l'île montagneuse de Santo Antao (le "Vert" du Cap Vert). Dans ce pays il n'y a quasiment pas de voiture individuelle (faute de moyens), même si j'ai quand même réussi à faire du stop. Mais leurs transports sont d'une remarquable efficacité (départs fréquents quand le minibus est plein, ou presque) et n'ont rien à envier à nos périphériques blindés de personnes seules dans leur voiture attendant la fin des bouchons. Bref, départ pour la transatlantique début mars avec un nouvel équipage, sur un monocoque cette fois ! L'excitation est présente dans le groupe d'amis trentenaires. Le mal de mer aussi, mais il passe, j'ai fini par l'accepter et il me laisse tranquille. On est 5 au total et la traversée dure 16 jours, pleine de déconnexion avec les réseaux et de reconnexion avec notre planète bleue.
Il faut s'y rendre à l'évidence, et tous les marins croisés m'ont dit la même chose : la voile c'est le mode de transport le plus inefficace pour se rendre d'un point A à un point B. Entre la lenteur, la météo capricieuse qui décide de la date du départ, l'inconfort de la navigation et tous les éléments qui cassent chaque jour sur un bateau (rien de strictement essentiel quand on fait attention et qu'on a de la chance), les trajets en voile doivent être vus de la même manière que ma petite aventure autour du monde : ce n'est pas la destination qui compte mais bien le voyage.
Ce ne sera pas possible de remplacer les avions par des voiliers pour réduire notre empreinte carbone, ça c'est sûr dans notre société. J'ai eu le temps d'y réfléchir profondément pendant la navigation (même si la conclusion est la même qu'en y réfléchissant sur terre... ça aide juste pour s'en rendre compte). Prendre l'avion est un de nos gestes les plus inessentiels que l'on fait et qui détruisent complètement (en ordre de grandeur) les autres que l'on peut faire pour vivre dans un monde durable. Evidemment il y a beaucoup d'autres actions à mener en même temps, loin de moi l'idée de pointer du doigt l'individu seulement (d'ailleurs pour mieux comprendre je recommande de lire Bon Pote). C'est enfin l'arrivée en Guadeloupe ! On voit la terre au petit matin du 16e jour. On passe 3 semaines ensemble après pour découvrir cet incroyable archipel (oui, moi aussi je croyais que ce n'était qu'une île) et se reposer quand même un peu. Puis je trouve un prochain bateau en ligne pour bouger dans les Caraïbes. Je rejoins le petit trimaran de course en bois vers mi-avril et nous nous lançons à l'assaut d'Antigua, Barbuda puis de Saint Martin où je débarque. Antigua et Barbuda étaient inconnues au bataillon, on ne savait pas à quoi s'attendre. C'est sec, comparé à la Guadeloupe et sa végétation luxuriante en tout cas, mais il y a de magnifiques couchers de soleil. Antigua est peut-être trop remplie de complexes touristiques de luxe, séparés de la population et uniquement construits pour la vue de carte postale. Barbuda se révèle être une surprise malgré son altitude quasi nulles avec ses interminables plages de sable blanc désertes, où quelques bateaux s'agitent lentement au mouillage. Le sable y est doux et l'eau bleue turquoise très claire ou révélant d'autres nuances plus subtiles.
L'arrivée à Saint Martin me sort de cette bulle. Cette île est aussi incroyable mais pour d'autres raisons. L'influence américaine y est très présente, encore plus côté hollandais. On paye en euros (côté français, en "guilder" côté hollandais étonnamment) ou en dollars pour les deux ! La population des deux côtés parle d'abord anglais, puis espagnol (beaucoup d'immigrés de république dominicaine) et uniquement français après pour le côté français (appris à l'école). Un mélange de cultures un peu déstabilisant par son originalité mais tout à fait enrichissant quand on échange avec les gens. Pendant deux semaines d'exploration de l'île, je réussis à trouver en ligne un embarquement pour rejoindre le continent, enfin !! La navigation serait de la Guadeloupe vers la Guyane ! Il faut maintenant que je me rendre en Guadeloupe mais je ne trouve rien en ligne. Je commence à être rodé maintenant, je prépare des affiches et vais démarcher les marins débarquant sur le dock à dinghy du mouillage. A la fin de la première journée, c'est trouvé ! Un couple de cinquantenaires toulousains adorables sur un catamaran me ramène en Guadeloupe. Ils continuent vers les Grenadines puis les îles ABC (Aruba, Bonaire, Curaçao) pour la saison des cyclones. J'ai aussi envie de les suivre mais je ne peux pas aller dans toutes les directions à la fois ! Je me retrouve donc en Guadeloupe il y a 10 jours (c'est difficile de garder en tête le temps qui passe pendant ce voyage, on ne sait plus quel jour on est et ce n'est pas plus mal). Il faut sortir le bateau pour la Guyane de l'eau et le repeindre (faire le carénage). Ceci fait, on se retrouve donc aujourd'hui ou demain pour un départ vers la Guyane ! 10 à 15 jours de navigation en perspective : presque autant qu'une transatlantique mais beaucoup moins en distance. Ce n'est pas parce que c'est un bateau peu efficace, c'est parce qu'on va affronter les vents et les courants contraires et peut-être faire du sur-place...
J'ai plusieurs idées pour la suite mais arrivons déjà en Guyane, ce sera une bonne chose de faite. Juste pour l'idée générale : rendre mon voyage utile à plus de personnes. J'en avais discuté avec Camille du catamaran Canaries - Cap Vert. Mon voyage est égoïste. Comme pour des études, quasiment tout l'apprentissage que j'en tire est pour moi. Donc évidemment avec ces "études" je peux me rendre très utile quand je rentre, la tête pleine d'idées. Mais c'est quand même dommage si je ne le fais pas pendant le voyage ! Je l'avais déjà en tête depuis la naissance du projet, puis ça avait été confirmé par la lecture du livre de Ludovic Hubler "le tour du monde en stop" mais cette fois c'est encore plus confirmé. Il me semble que j'en ai au moins pour un an en Amérique du Sud en tout cas. A bientôt pour la suite ! Josué
Article paru suite à ces nouvelles : Tarn. Josué Maechling poursuit son tour du monde en stop, il est encore en mer | Actu Occitanie
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