Guyane, Suriname, Guyana, un petit bout de Brésil et de Venezuela ?
- Josué Maechling
- 4 sept. 2022
- 6 min de lecture

Bonjour Fabien,
Cela fait maintenant bientôt 3 mois depuis notre dernier contact et j'ai pu bouger plus amplement qu'en bateau, je viens donc vers toi avec les nouvelles du voyage.
Nous nous étions quittés juste avant mon départ pour la Guyane, que j'ai rejoint en bateau et où j'ai bougé pendant 3 petites semaines, la traversant d'Ouest en Est jusqu'au Brésil puis dans l'autre sens pour rallier le Suriname, ne m'y attardant pas trop longtemps. J'ai eu l'occasion de rester quelques jours dans un centre pour enfants handicapés (mentalement ou physiquement) à Nieuw Nickerie mais il n'était pas nécessaire que j'apporte une aide quelconque même si j'aurais apprécié participer plus amplement.
Le voyage se transforme beaucoup plus en aventure quand j'entre au Guyana. Ne sachant pas trop à quoi m'attendre, le pays n'étant pas vraiment connu en France car son nom est "masqué" par la Guyane (que le reste du monde appelle Guyane Française pour faire la différence), j'ai été très agréablement surpris.
Le pays est censé être plus touché par la criminalité que le Suriname (déjà plus touché que la Guyane), mais je ne l'ai pas du tout ressenti. Le stop est devenu mon indicateur de santé sociale des pays où je vais et décidément le Guyana est en excellente forme. Fruit d'un mélange d'ethnies et de religions, le pays révèle des habitants tous plus accueillants les uns que les autres (c'est d'autant plus vrai qu'on s'éloigne des villes). J'attends 2 semaines dans la capitale la livraison d'une paille filtrante, me permettant de boire de l'eau potentiellement contaminée microbiologiquement sans aucun risque. Je prépare en effet de passer par la jungle pour atteindre les chutes d'eau de Kaieteur, qui ne sont normalement visitées qu'en avion depuis la capitale (plus d'une heure d'avion pour un petit tour très encadré sur place...).
Ne sachant pas trop à quoi m'attendre et prévoyant de futurs problèmes d'accès à l'eau potable dans de prochains pays (forçant la consommation de bouteilles en plastiques, je préfère donc m'équiper.
Pendant l'attente, je contacte l'ONG Humanity First présente ici pour savoir comment je pourrais aider. Ni une ni deux le responsable a ce qu'il me faut : une bénévole se rend dans des lycées donner des conseils pour faire des CVs et pour les entretiens d'embauches et je peux ajouter quelque chose à la fin. Il suggère un peu de savoir faire en finance pour encourager à économiser pour quelque chose de pertinent et éviter de gaspiller son argent. Je fais donc un petit cours mêlant conseils de finance, voyage et liant les économies avec leur impact sur le climat à la fin aussi ! Ils ont aimé et ont appris quelque chose de nouveau, le lien avec le voyage dynamisant la discussion.
La paille arrivée, je traverse donc la jungle en stop sur des pistes de terre à dos de pick-ups ou de gros camions tout-terrains très chargés pour arriver à Mahdia, ville minière. Je rejoins la rivière Potaro dans un endroit appelé Pamela Landing (à partir de là les noms ne sont plus sur les cartes) où je reste au final une semaine avec un orpailleur et sa famille, me permettant de voir tout le processus et de mieux comprendre leur point de vue (qui n'est en fait que celui de personnes cherchant un salaire pour vivre et qui ne se rendent pas forcément compte des dégâts que leur travail engendre). J'en profite pour ramasser leurs déchets plastiques éparpillés un peu partout, ça les inspire un peu à éviter de les jeter partout. Ma coiffure change aussi et j'obtiens des tresses, m'aidant à supporter mon expérience de croissance capillaire (elles se révéleront très utiles pour supporter la chaleur dans la jungle).
J'espérais pouvoir remonter la rivière jusqu'aux chutes en pirogue. J'arrive à peine à la moitié en pirogue-stop, au village d'Amatuk (pas facile à faire, mon lien avec les habitants créé pendant la semaine a rendu cela possible). Personne ne s'aventure plus loin, personne n'y habite. Il faudrait payer 300€ pour me faire remonter en pirogue (débarquement et transport de la pirogue à la main au milieu pour passer les rapides de Waratuk).
Mais surprise, on me dit qu'il existe un chemin et que c'est faisable en un jour ! Génial, c'est 23km au moins mais si c'est faisable en un jour le chemin doit être bon.
Disons que c'était le cas il y a 10 ans ! Le représentant du village m'emmène au début, en m'ayant prêté une sorte de sabre/machette cassé qui ne coupe pas. Je comprends vite l'utilité...et regrette d'être parti quand je me retrouve seul à "plier" les feuilles, lianes, buissons et ronces sur mon "chemin". Il n'y a bien évidemment plus rien, il faut créer le chemin en coupant mais je préfère pousser ce qu'il y a devant moi car je perds beaucoup trop de temps (et je perds le "chemin" très souvent bien sûr).
Après 2 jours de marche j'arrive en bas des chutes, enfin ! A partir de là il y a une maison d'hôtes vide pour les touristes qui remontent la rivière en bateau et il y a un réel chemin (mal entretenu mais existant), plus besoin de traverser les ruisseaux plein de vase et se vider de son énergie.

Je profite peu des chutes, ayant la pression du retour derrière. Le chef du village m'a dit de tout simplement me faire un radeau avec des bambous ou de reprendre le "chemin". Mes pieds bien mal en point ne peuvent pas réaliser la deuxième option et l'absence totale de bambous me fait bien rigoler. Je ne peux pas couper des arbres pour compenser. Un vieux canöe abandonné et prenant l'eau semble être ma meilleure option. Il est juste beaucoup trop long et lourd pour que je passe les rapides avec.
Mais une fois en haut les guides et les ouvriers me disent qu'il y a des avions de ravitaillement qui viennent presque tous les jours de Mahdia et qui repartent vides. Le stop est donc tout à fait possible et je m'envole quelques minutes en survolant les chutes pour rejoindre ma nouvelle famille à Pamela Landing et récupérer mes affaires. Mon défi de ne pas utiliser l'avion est donc déjà raté ! Mais au final cela m'importe peu, la philosophie du voyage restant préservée. C'est le même principe que de vouloir faire le tour du monde, le faire géographiquement m'importe peu du moment que je reste fidèle à la philosophie du voyage. Je pourrais aussi essayer de me justifier avec les conditions qui rendaient le voyage légitime, que ce soit au niveau du stop, de la très faible distance ou simplement de ma survie...
Je quitte enfin le Guyana après cette aventure de petit Indiana Jones, empruntant de longues pistes de terre à bord d'autres véhicules très peu confortables mais tout autant amusants, traversant jungle et savane.

Le stop au Brésil se révèle difficile et le Guyana me manque déjà ! Les brésiliens dans l'État de Roraima sont apparemment plus fermés à la "carona" (l'équivalent du stop), effrayés par les réfugiés Vénézuéliens. Une fois arrivé à Boa Vista, je ne traîne pas et me rend au Vénézuela, souhaitant voir le mont Roraima (haute montagne au sommet complètement plat, de type "tepuy").

Le stop est encore plus difficile voire quasi impossible ! Je passe des heures sans rien obtenir, j'essaye de remonter plus au Nord (en attendant un jour entier quand même) mais l'attente me permet de me rendre compte que le long trajet prévu et l'énorme détour que cela engendrerait sur le tour de l'amérique n'est pas rentable, d'autant plus qu'il n'est pas plus facile de faire du stop au Nord du pays, au contraire...
Ils connaissent tout à fait le stop mais avec les crises traversées, peu ont une voiture et de toute façon la mentalité semble ne plus s'y prêter... Mon thermomètre social du stop (la cola ici) est au plus bas mais les trajets que j'ai effectués étaient quand même en stop !
Peut-être que j'y reviendrai mais en vélo cette fois.

Retour à Boa Vista chez Jair (pas Jair Bolsonaro bien sûr) le meilleur brésilien qui existe (il m'avait accueilli chez lui à l'aller en m'ayant vu avoir du mal à faire du stop). J'ai un contact avec l'ONG Fraternity – International Humanitarian Federation mais n'ayant pas trouvé d'hôte pour une plus longue durée je ne pense pas pouvoir rester avec eux pour aider les réfugiés Vénézuéliens des communautés indigènes à s'intégrer au Brésil. Je vais peut-être me concentrer plus sur les écoles et les campagnes où le contact est plus rapide, facile et efficace !
Direction pour les prochains mois : Manaus puis la Bolivie, le Paraguay, retour au Brésil jusqu'à Sao Paulo (pour peut-être retrouver un ami brésilien vivant en Europe) puis Rio de Janeiro, l'Uruguay, l'Argentine (jusqu'en Patagonie), Chili, Pérou, Equateur et enfin Colombie ! De longs mois à venir...
Je joins quelques photos, j'espère que je n'ai pas fait trop long !
A bientôt !
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